Le magasin physique est-il voué à disparaître ?
Avec l’irruption du commerce connecté dans notre quotidien, nombreux sont ceux qui pensaient que le consommateur délaisserait le magasin physique au profit des touchpoints e-commerce ou m-commerce (sites, applis, social et live shopping, etc..). Le contexte sanitaire a fortement accéléré le processus : les ventes de produits sur Internet ont progressé de 44% entre 2019 et 2021, mais force est de constater que le commerce « offline » résiste. Il représente toujours une très large part du commerce de détail, à hauteur de 85%.
Toutefois, cette position dominante dans les pratiques d’achat est bousculée par la montée en puissance des usages connectés, accouchant de parcours unifiés entre le store et les dispositifs digitaux, visant in fine à ne servir qu’un seul besoin, celui du client. Ce dernier y trouve de plus en plus de bénéfices et s’associe donc à cette entreprise d’unification du commerce entre les canaux on et off, pour lesquels les frontières deviennent toujours plus poreuses.
Deux stratégies pour intégrer le digital au cœur des points de vente
Le magasin est un espace d’achat certes, mais il ne se résume pas qu’à cet aspect. Avec l’intégration du digital dans les parcours des clients, les commerces tendent à être aménagés comme des lieux expérientiels qui transforment les modes d’achats et jouent avec les sens des consommateurs, les faisant vivre une expérience que le seul écran de mobile ou d’interface web ne peut leur promettre.
À ce stade, une première stratégie consiste à intégrer des solutions digitales pour répondre à des enjeux marketing qui jouent sur les émotions des clients, le bien-être, la réassurance. On l’interpelle ainsi dans un parcours sans couture pour le faire plonger dans une expérience de marque, sans visée transactionnelle ou de conversion immédiate. Le QR code sur les produits pour consulter des avis clients ou informations détaillées, les miroirs connectés pour les essayages, les bornes interactives pour accéder au catalogue de produits et passer commande depuis la boutique quand le produit est en rupture de stock, sont des exemples de pratiques qui mettent en scène des produits physiques et leur confèrent une nouvelle dimension.
Une seconde stratégie consiste à s’appuyer sur la technologie pour arrimer le client à la marque, tant en phase d’acquisition que de fidélisation.
L’accompagnement par des vendeurs formés pour aider à la personnalisation de produits sur des interfaces type tablette vendeur, est un exemple bien connu. En exploitant ce type de dispositifs, le retailer dispose d’outils pour collecter les informations clés sur le client ou potentiel client et, de facto, mieux répondre à ses attentes lors de ses interactions avec la marque via le vendeur en magasin ou, le cas échéant, le service client. Articulé autour de ces approches de data unifiée, entre les données issues des parcours web du client et celles collectées dans son expérience physique, cette approche ouvre des perspectives intéressantes pour le retailer qui peut affiner ses conseils et les personnaliser.
Réinventer le commerce physique pour mieux répondre aux attentes des consommateurs
Le commerce physique propose aujourd'hui, et a fortiori dans une ère post-COVID, de multiples leviers digitaux pour réenchanter et faciliter la vie du client. En témoignent le recours pour certains, la poursuite de la croissance pour d’autres, des pratiques omnicanales. L’essor du click & collect ou encore celui du ship from store (une pratique logistique qui transforme des points de vente en zones de stockage et d’expédition permettant de livrer rapidement un produit) en sont la preuve dans notre quotidien de consommateurs.
Un point de friction majeur dans le parcours client en magasin reste le passage en caisse ; là où le commerce en ligne gomme la notion de file d’attente et pourvoit au besoin d’immédiateté dans la transaction. Cependant, des innovations s’appuyant sur la dématérialisation des moyens de paiement ont vu le jour pour fluidifier cette étape finale. Par exemple, Amazon Go déploie sa technologie du « just walk out » : en entrant dans le magasin, le client scanne son téléphone ou sa carte bancaire, puis des capteurs placés dans le magasin détectent le contenu de son panier et le débitent automatiquement sans passage en caisse.
Au-delà de la mise en place de ces solutions visant à faciliter les parcours d’achat, le magasin physique peut également prendre des formes hybrides qui enrichissent l’expérience en la mêlant à celle du e-commerce. C’est par exemple le cas du showrooming, situé à mi-chemin entre le commerce physique et online. Il s’agit d’un lieu d’exposition au sein duquel le client peut découvrir et se renseigner auprès de conseillers de vente, pour poursuivre l’achat sur un site Internet. Un tel modèle a cependant une limite à ne pas négliger : un consommateur peut en effet être amené à comparer le prix du produit et décider de l’acquérir via un autre e-retailer proposant un prix plus attractif.
Quoi qu'il en soit, en se renouvelant continuellement, en assumant le canal e-commerce comme un partenaire complémentaire plutôt qu’un concurrent interne, le point de vente physique a de belles années devant lui. Si certains prévoient un bouleversement imminent avec l'avènement du métavers, son usage à des fins commerciales n’est pas pour tout de suite au vu des coûts logistiques et financiers que représente aujourd’hui l’intégration d’une marque dans ce vaste univers virtuel.